L'ordre régional des pharmaciens d'Occitanie a publié ce jeudi 30 avril 2020 un communiqué dans lequel la profession dénonce une "duperie" concernant les réquisitions de masques, depuis le début de la crise sanitaire. D'autres professionnels de santé doivent s'y associer dans les jours à venir.
"On nous a trahi : pharmaciens, professionnels de santé, patients." : c'est une colère froide qui s'exprime dans ce texte émanant de l'ordre régional des pharmaciens d'Occitanie, publié jeudi 30 avril.
L'objet de cette colère ? La gestion des masques dans la crise sanitaire du Covid-19 qui frappe la France. "Nous sommes indignés", explique Jean-Marie Guillermin, le vice-président de l'ordre régional des pharmaciens, lui-même pharmacien à Toulouse. "On nous a interdit de vendre des masques à des patients atteints d'un cancer, ou souffrant d'obésité. On nous a donné des stocks minimes, et nous avons dû les distribuer au compte-goutte aux professionnels de santé. Certains d'entre eux sont tombés malades, faute de protection. Et aujourd'hui, on nous annonce 400 millions de masques en vente dans la grande et moyenne distribution !"
Pendant que la profession se donnait à 100% pour assurer une continuité des soins à la population et gérer la distribution plus qu'aléatoire des masques aux professionnels de santé, ceci, dans le contexte de l'urgence sanitaire, ces pharmaciens de première ligne se faisaient duper par nos instances gouvernementales
Le chiffre de 400 millions de masques à la vente est peut-être à avancer avec prudence. Toutefois, depuis quelques jours, les patrons de la grande distribution ont mentionné des quantités très importantes de masques à vendre dans leurs enseignes. Mis bout à bout, il s'agit de plusieurs centaines de millions, même si tout ne sera pas à disposition dès le 4 mai.
Pour l'ordre régional des pharmaciens, il est clair que pendant les restrictions, les grandes surfaces faisaient leurs stocks. Impossible en effet que lesdits stocks se soient reconstitués soudainement, à quelques jours du déconfinement annoncé. "Le problème n'est pas que ces GMS (grands et moyennes surfaces) vendent", précise Jean-Marie Guillermin, "le problème, c'est que nous, on nous restreint depuis des mois".
Il y a donc eu, au minimum, une incapacité à gérer la pénurie
L'ordre régional des pharmaciens d'Occitanie exige désormais des réponses. "S'il s'agit d'importation", interroge le communiqué, "pourquoi n'y a-t-il pas eu de réquisition au-delà de 5 millions de masques importés par trimestre, ceci, dans un contexte de "pénurie" empêchant de protéger nos soignants et nos patients ?
Pourquoi a-t-on continué à nous interdire la distribution, même gratuite, de ces masques aux patients alors que dans le même temps, d'autres sociétés ou la vente en ligne les proposaient à des prix prohibitifs ?"
Et de conclure en demandant que les "responsables", les ministères de la santé et des finances, s'expliquent dans le cadre d'une enquête parlementaire. Dans la foulée, un communiqué de même teneur a été publié au niveau national, signé par différents conseils de l'ordre (médecins, infirmières, kinésithérapeutes, sage-femmes, chirurgiens-dentistes, pharmaciens, pédicures-podologues). Intitulé "Les masques tombent", il dénonce une "surenchère de l'indécence".
De son côté, la fédération du commerce et de la distribution a réagi. "Les enseignes de la grande distribution ne sont pas, et n'ont jamais été, en charge de l'achat et de la fourniture de masques pour les soignants. Leur attribuer les difficultés d'approvisionnement est donc faux et malhonnête", selon un communiqué. "Il n'y a pas de stocks cachés", insiste la fédération, qui fait valoir que les chiffres annoncés "concernent les commandes
effectuées, qui ne vont être livrées que très progressivement, avec une disponibilité plus rapide des masques à usage unique que des masques en tissu réutilisables".